Comment une marque peut-elle subtilement influencer son positionnement et son image en changeant le fil narratif de son HISTOIRE ? Exemple d’Apple et du lancement de l’iPhone X.

Il y a dix ans, pour le lancement de l’iPhone original, Apple confia quatre exemplaires de son smartphone révolutionnaire à quatre journalistes : Steven Levy de Newsweek, Ed Baig de USA Today, Walt Mossberg du Wall Street Journal et David Pogue du New York Times. Ils n’avaient pas été choisis au hasard ; Apple avait en effet déjà une relation de longue date avec ces journalistes, et savait que les avis publiés seraient favorables. Ces quatre journalistes, même s’ils travaillaient pour de grands journaux, étaient tous des technophiles, connaissaient bien le marché et avaient tous les connaissances nécessaires pour tester de manière approfondie l’appareil qui leur était confié.

En tant que société High Tech cette stratégie consistant à confier des exemplaires du nouveau modèle d’iPhone à la presse spécialisée a été respectée par Apple au fil des ans, ainsi que par tout le reste de l’industrie informatique. Mais les tests des sites spécialisés n’étaient plus nécessairement aussi dithyrambiques au sujet des appareils à la pomme. Ainsi certains sites avaient osé émettre des critiques sur l’Apple Watch series 3 ! C’est pourquoi pour le lancement de l’iPhone X Apple décida de changer son fusil d’épaule et choisit de confier ses exemplaires de test à des sites bien différents. C’est ainsi que le magazine Fashion se trouvait parmi les testeurs. D’un point de vue test technique, la vidéo de Fashion était nulle. Mais ce n’était pas l’objectif d’Apple, au contraire.

En donnant l’appareil à des sites peu habitués aux honneurs, Apple avait bien plus de chances d’obtenir des avis favorables (oubliez l’éthique journalistique, ce ne sont pas vraiment des journalistes). En laissant peu de temps aux magazines pour tester l’appareil, ils réduisaient le risque de découverte de problèmes cachés et minimisaient également le risque de critiques techniques. Et comme les premiers avis publiés allaient fortement influencer la perception du public, ils purent dicter le fil narratif. Cette stratégie fut également l’occasion de rappeler à la presse spécialisée, de manière pas très subtile, qu’Apple préfère les tests positifs, et que ce serait vraiment dommage qu’ils soient désormais exclus d’office du club des testeurs privilégiés sélectionnés par Apple.

Apple a également pu toucher des publics qui n’allaient jamais sur les sites techniques ; le marché des Geeks est de plus en plus saturé et les innovations techniques sont de moins en moins importantes car l’iPhone devient mature. Toucher un public différent devient donc stratégiquement de plus en plus important. Ce n’est vraiment pas ma tasse de thé, mais je dois malheureusement bien reconnaître que le futur de l’Apple de 2018 dépend beaucoup de sa capacité à imposer l’iPhone comme étant un produit « fashion » entraînant un effet de mode et donc de renouvellement régulier.

Ce bref exemple nous a permis d’étudier comment une marque peut modifier sa stratégie de communication pour forcer les sites à publier des avis positifs sur ses produits ; le choix des sites avait l’air anodin, mais il était le résultat d’une stratégie délibérée et savamment orchestrée. Cela montre aussi à quel point les avis des « influenceurs » sont peu fiables…